En bref :
Le projet GloBE (Global Anti-Base Erosion) est une initiative de l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Économiques) qui s’inscrit dans le Pilier 2 du cadre BEPS (Base Erosion and Profit Shifting). Il vise à lutter contre l’érosion de la base d’imposition et le transfert des bénéfices vers des juridictions à faible fiscalité.
Ce projet repose sur l’idée d’un taux d’imposition effectif minimum de 15 % pour les grandes multinationales (avec un chiffre d’affaires d’au moins 750 millions d’euros). Si une entreprise paie un impôt inférieur à ce seuil dans un pays, il y a un mécanisme permettant à d’autres États de récupérer la différence.
Les pays qui ont adopté ces règles sont principalement ceux de l’OCDE, mais la réforme s’étend à d’autres pays du G20 et à d’autres juridictions collaborant avec l’OCDE (140 pays concernés). Les règles sont entrées en vigueur en 2024 pour les exercices fiscaux commençant après cette date.
L’objectif de cet article est d’explorer le fonctionnement, la méthode de calcul et les enjeux pour les multinationales.
POURQUOI METTRE EN PLACE LE PROJET GLOBE ?
La règle GloBE (ou Pilier 2) a été mis en place pour plusieurs raisons :
- Réduire l’érosion de la base d’imposition et le transfert des bénéfices :
GloBE vise à limiter l’optimisation fiscale agressive des multinationales qui déplacent artificiellement leurs bénéfices vers des pays à faible fiscalité, voire sans impôt, comme l’Irlande, les Bermudes ou les Îles Caïmans avec un impôt minimum de 15%.
- Rééquilibrer la concurrence fiscale entre Etats :
Avant l’adoption du projet GloBE, de nombreux pays baissaient leur taux d’imposition pour attirer les sièges sociaux des entreprises multinationales. Cette compétition fiscale conduisait à une diminution des recettes fiscales mondiales et à des déséquilibres entre pays. D’autres pays ont répliqué en baissant leur propre taux d’impôt pour rester attractifs.
Avec GloBE, un plancher fiscal mondial est mis en place, limitant ainsi la possibilité pour les États d’attirer les entreprises uniquement grâce à des taux très bas. Cela favorise une concurrence basée sur d’autres facteurs (qualité des infrastructures, innovation, main-d’œuvre qualifiée, etc.).
- Renforcer la transparence et la stabilité du système fiscal international :
Le GloBE propose des règles fiscales coordonnées au niveau international, réduisant ainsi les divergences fiscales entre les pays et rendant les pratiques fiscales des entreprises multinationales plus transparentes et compréhensibles.
COMMENT S’APPLIQUE LA REGLE GLOBE ?
Elle s’applique en plusieurs étapes en tenant compte de la structure et de la fiscalité des entreprises concernées.
Détermination du périmètre d’application
Avant d’appliquer la règle GloBE, une entreprise doit vérifier si elle entre dans son périmètre :
Calcul du taux d’imposition effectif (TIE) et déclaration
L’application de la règle GloBE repose sur la comparaison entre le taux d’imposition effectif d’une entreprise et le seuil 15%.
Formule de calcul :
- Impôts couverts : incluent l’impôt sur les sociétés locales et certains autres impôts équivalents et différés
- Revenu GloBE : basé sur les états financiers consolidés ajustés pour exclure certaines déductions et exonérations fiscales et selon la règle de non-déduction fiscale : c’est l’interdiction à une entreprise de déduire fiscalement certaines dépenses lorsqu’elles sont payées à une entité du même groupe bénéficiant d’une imposition inférieure au seuil minimum de 15%
Le régime GloBE impose le calcul d’un taux d’imposition effectif spécifique, basé sur des règles comptables ajustées et distinctes de celles prévues par la législation française en matière d’impôt sur les sociétés.
En complément, le taux d’imposition effectif est calculé par juridiction fiscale et non entité par entité. Par ailleurs, en fonction de la transposition locale des règles GloBE, les comptes utilisés pour ce calcul peuvent être établis selon différentes normes comptables, telles que les IFRS ou les référentiels locaux (local GAAP).
Une fois les TIE calculés et l’ensemble des données à déclarer récoltées, une entité constituante du groupe peut centraliser la déclaration GloBE auprès de l’administration fiscale de sa juridiction, à condition qu’aucune obligation locale contraire ne s’y oppose et qu’un mécanisme d’échange automatique d’informations soit en place.
Application des règles correctives du projet GloBE
Income Inclusion Rule (IIR)
Imposition par la maison-mère : si une filiale a un TIE inférieur à 15%, alors la maison-mère applique la règle IIR pour combler l’écart.
Exemple : Une entreprise française a une filiale en Irlande. Cette filiale réalise un résultat net avant impôts de 100 millions d’euros, elle paie 12,5 Millions d’euros d’impôts (taux 12,5%).
- Le TIE de la filiale est donc de 12,5% inférieur au seuil de 15%.
- La maison mère française doit payer un complément d’impôt pour les 2,5% manquants (soit 2,5 Millions d’euros).
- La filiale en Irlande atteint le seuil de 15% imposition effective.
Undertaxed Payement Rule (UTPR)
C’est le cas où la maison-mère est située dans un pays n’appliquant l’IIR (n’ayant pas adopter les règles GloBE), d’autres pays où la multinationale opère peuvent récupérer une part de l’impôt manquant. Cette récupération se fait en fonction de la présence économique du groupe dans chaque pays (effectif et actifs sur le territoire).
Récapitulatif des conditions d’application des règles correctives
Paiement et suivi des obligations fiscales
Les entreprises concernées doivent s’acquitter du complément d’impôt et ajuster leur comptabilité en conséquence.
Le processus est décrit ci-dessous :
Le paiement de la « top-up tax » peut être pris en charge par l’entité mère ultime selon le mécanisme de l’IIR, par une ou plusieurs entités désignées selon UTPR, ou directement prélevé par l’administration fiscale locale, selon les modalités prévues par la législation de chaque juridiction.
QUELS SONT LES ENJEUX POUR LES ENTREPRISES ?
La mise en place des règles GloBE crée plusieurs enjeux majeurs pour les multinationales qui doivent adapter leur stratégie fiscale, financière et organisationnelle :
- Réduction de l’optimisation fiscale agressive et nouveaux risques de conformité :
Les multinationales doivent adapter leurs stratégies fiscales, car les règles GloBE réduisent l’intérêt des paradis fiscaux et imposent une plus grande transparence (exigences accrues en matière de reporting fiscal).
- Hausse des coûts fiscaux et impact sur la rentabilité :
Le paiement du complément d’impôt GloBE peut augmenter la charge fiscale totale des groupes et affecter leurs résultats.
- Adaptation des processus internes et gouvernance fiscale :
Les multinationales doivent adapter leur organisation pour intégrer les exigences de GloBE dans leurs systèmes comptables, fiscaux et de reporting.
© Article rédigé par votre équipe VNCA